LE BILLET DE LOGEMENT

Huile sur panneau 1890 (57 x 38 cm)    

Figaro-Salon 1890 p.47 – vente New-York 1911 – Vendu par Silla Fine Antiques en 2014

L’année 1890 est celle de la scission entre la Société des artistes français et la Société nationale des beaux-arts. A Paris trois salons ouvrent leurs portes à un public quelque peu désorienté : Les Indépendants exposent du 20 mars au 27 avril au Pavillon de la Ville de Paris, la Société des Artistes français du 1er mai au 30 juin au Palais des Champs-Elysées et la Société nationale des beaux-arts, du 15 mai au 30 juin au Palais des beaux-arts du Champ-de-Mars. C’est aux Champs-Elysées que Le Blant accroche Le Billet de Logement.

Le billet de logement est un acte administratif, délivré par le maire d’une commune, qui enjoint à un habitant de cette commune de loger des militaires de passage, et parfois leurs chevaux. Il peut aussi les obliger à les nourrir et les entretenir.

Il permet ainsi à des militaires d’être logés temporairement si la ville ne dispose pas de caserne pour les accueillir. Cette pratique vaut aussi en temps de paix, lors des manœuvres, etc. Il est très utilisé pour réquisitionner les logements pour les nombreux mercenaires étrangers de l’armée napoléonienne qui avaient « un nom à coucher dehors », d’où l’expression « à coucher dehors avec un billet de logement ». Cette pratique n’est pas spécifiquement française : elle s’observe dans d’autres pays.

Il s’agit d’un travail exceptionnel en huile sur panneau dépeignant avec des couleurs vives et des détails parfaits une paire de soldats livrant un billet à un compatriote.  Les deux soldats semblent épuisés, sales et transpirant, alors qu’un vieil homme prend connaissance du document.  L’arrière-plan s’estompe, laissant place aux maisonnettes du village et au sentier sinueux sur lequel des poulets se promènent librement. Au premier plan les trois figures sont absolument nettes, vivantes et expressives.  Tous les détails sont saisis avec justesse, des boucles d’oreilles aux traits marqués du vieux civil aux jambes boueuses des soldats.

« M. Julien Le Blant n’a plus consacré son pinceau aux hauts faits des chouans ; il a bien fait, car son Billet de logement est un tableautin où un petit incident des guerres héroïques de la Révolution est reproduit avec une finesse et un esprit de bon aloi. » (La République française 12 mai 1890)